A l’occasion de mon 1er anniversaire chez CoDA, voici mon histoire de rétablissement, que j’ai partagée en réunion CoDA hier soir. J’avais envie de la partager avec d’autres membres de CoDA. J’apprécie vraiment la communauté en ligne, c’est une vraie ressource pour apprendre de l’expérience des autres membres. Continuez (de partager), s’il vous plaît !

Au préalable, je voudrais préciser quelque chose : le début de mon rétablissement s’est fait via deux programmes en 12 Etapes, AA et CoDA. Je naviguerai de l’un à l’autre, en faisant référence à l’un puis à l’autre, car tous deux ont été essentiels dans ma prise de conscience de la maladie de la codépendance, sans parler des symptômes (alcoolisme et toxicomanie) qui ont résulté de mes tentatives d’automédication en voulant « traiter » cette maladie.
Cela fait maintenant 1 an et 1 semaine aujourd’hui que j’ai assisté à ma 1ère réunion CoDA. J’étais tellement dissociée émotionnellement que je ne pourrai guère vous en dire plus, si ce n’est que j’ai pleuré tout au long de la réunion, enchainant les kleenex pleins de morve et de larmes. Je ne connaissais ces gens ni d’Eve ni d’Adam, mais cela n’avait pas d’importance. D’une certaine façon, me retrouver dans la même pièce que des gens qui semblaient se sentir aussi fous et hors de contrôle que moi, ce n’était finalement pas plus mal. Mais, encore une fois, c’était aussi mauvais signe, car je me suis vite dit : « Mon Dieu, si nous ressentons tous cela, alors le monde en général doit ressentir cela aussi et si c’est le cas, alors je suis vraiment dans un sacré pétrin ».
Je me sentais anesthésiée et j’avais la tête comme dans une cocotte-minute, vous savez, comme quand on a les oreilles bouchées pendant que l’avion descend, et que tout le bruit qui vous entoure semble étouffé, le monde extérieur engourdi, tout ce que j’entendais était vrombissement continu. Mes oreilles ne pouvaient ou ne voulaient pas se déboucher. Je me sentais vaseuse, j’avais du mal à me concentrer. Cela peut paraitre étrange, mais je me sentais coincée dans la tête, tellement dissociée de tout ce qui m’entourait. Je n’arrêtais pas de me dire que « ça ne le faisait pas » ici et j’ai quitté cette 1ère réunion sans savoir si CoDA était quelque chose que j’avais envie de faire ou non, si la codépendance était quelque chose que je voulais admettre ou non.

Je n’étais sobre que depuis une semaine, ayant vidé ma toute nouvelle bouteille de vodka et donné les 2 dernières caisses de bière qui me restaient d’une récente fête. (Oh, et puis j’ai aussi jeté un sac d’herbe dans les toilettes environ une semaine plus tard, après avoir finalement réalisé que fumer de l’herbe était tout autant une méthode de fuite que de boire.)
Mon voisin de 21 ans, membre des AA, m’a emmenée à ma première réunion en 12 étapes le 17 septembre. J’étais tellement paniquée par la salle pleine à craquer de gens qui parlaient de la solution à leurs vieux problèmes avec l’alcool que ma réaction a été : « Ce n’est pas du tout mon style. » Très honnêtement, je ne vois pas les AA comme un endroit où je me sens chez moi, mais cela n’a pas vraiment d’importance, tant que je participe à un programme en 12 étapes et que je ne consomme pas de drogues ou d’alcool pour me « soigner ».
Je dois dire cependant que dès le soir suivant, lors de ma 2eme réunion, je me suis déclarée alcoolique, hésitant sur les mots tandis que j’allais chercher mon Jeton du Nouveau. C’était presque drôle de voir à quelle vitesse j’étais passée d’un état d’ébriété totale à une sobriété aveuglante en quelques minutes. Je ne me reconnaissais pas moi-même pendant mes premières semaines de sobriété. (À noter que pendant un bon bout de temps, personne dans ma vie n’a cru que j’étais vraiment sobre. Beaucoup pensaient que c’était juste une autre « période » ou « une passade que traversait Michelle ».)
J’étais seule, solitaire et sobre. J’étais terrifiée. Mais j’étais aussi pleine de motivation d’arrêter de boire et, pour une fois, de faire face à cette relation qui venait de se terminer. Comme à beaucoup d’autres, on m’avait dit : « Tu es codépendante. Va à une réunion ! » Je n’y suis jamais allée lorsque j’étais en couple ; cela aurait été bien trop sain, et j’étais loin de l’être.

Mais laissez-moi revenir un mois en arrière, avant la fin de ma dernière relation, juste au moment où j’ai touché le fond.
Ma partenaire et moi étions officiellement ensemble depuis mai, mais nous avions toutes deux de sérieux problèmes à nous séparer de nos ex. C’était toute une histoire. Nous avions eu un début accidenté et dramatique et nous avons terminé à peu près de la même manière. Elle accepte sa part de responsabilité dans la fin de notre relation et je suis maintenant capable d’accepter la mienne.
Il est difficile de vous décrire la personne codépendante que j’étais et les comportements malsains dans lesquels j’ai embarqué ma partenaire. Non seulement de par les comportements embarrassants que j’ai eus, mais aussi parce que, j’ai longtemps refusé de croire que c’était moi qui avais un problème : insécurité, jalousie, obsession, possessivité, être envahissant.e, alcoolisme, toxicomanie, promiscuité sexuelle, outre-manger, rage, refus d’intimité sexuelle, intimité sexuelle forcée, attentes irréalistes, jugement, blâme, bref, être codépendant.e. Même si je les ai niés à l’époque, voilà tous mes problèmes.
Il me faudrait des heures pour vous raconter toutes les choses que j’ai infligées à ma compagne et à moi-même de par ma codépendance, je vais juste vous le résumer par ces quelques images : ivre, défoncée, bagarres, bleus, portes cassées, peau déchirée, cheveux arrachés, serrures de portes de chambre démontées, cris, portes claquées, tromperie ( adultérine), mensonge, souffrance, espionnage, menaces, appels au SAMU, dépositions de police pour violences conjugales, psychodrames de déménagement. C’était ma vie de codépendante. De chaque jour. Et je vous décris juste l’une de mes relations.
Malgré tous ces criants problèmes, il a fallu qu’elle me quitte pour que je réalise que j’étais atteinte de cette maladie de codépendance qui me tuait à petit feu.

Ma relation s’est donc terminée, ma partenaire a déménagé et je me suis assise avec mes deux codépendants de chiens sur le perron, pleurant la moitié du temps et essayant de dormir pour calmer la douleur l’autre moitié. Le travail n’était même pas envisageable, tant j’étais inopérante. Je ne sais pas si télétravailler pendant cette période a été une bénédiction ou si cela a juste surajouté à la torture.
J’étais au plus bas et c’est ce qui m’a finalement amenée chez CoDA… Oh ça et une visite en milieu d’après-midi aux urgences psychiatriques après des jours de pensées suicidaires.
Revenons à CoDA. J’ai donc commencé à aller aux réunions CoDA. Au début, il ne se passait vraiment pas grand-chose. J’allais à une réunion, je pleurais, je rentrais chez moi , en me sentant toujours abandonnée, seule, isolée, folle, confuse. Je m’accrochais à mon Jeton du Nouveau et je le tripotais tout au long de la journée, tout au long des réunions, assise dans la baignoire. Je disais la Prière de la Sérénité. Parfois ça marchait, parfois non. Mais j’y revenais sans cesse, comme on dit. J’ai commencé à lire de plus en plus sur la codépendance et la dépendance affective. Plusieurs livres m’ont aidée à comprendre qui j’étais vraiment, qui j’étais devenue et qui j’avais si peur de continuer d’être. J’ai tenu un journal, je me suis liée d’amitié avec d’autres codépendant.e.s ; j’ai passé du temps seule, apprenant à m’aimer, ce qui était vraiment une nouveauté pour moi.

L’un de mes plus gros problèmes avec les programmes en 12 étapes a été la question de Dieu, comme je l’appelle. Comme plusieurs autres membres du programme, je suis arrivée chez CoDA avec des sentiments de colère, de ressentiment et de trahison de la part de l’Eglise, des chrétiens, de Dieu. Je ne voulais rien avoir à faire avec un programme qui était principalement basé sur ma croyance en des choses que j’avais travaillé si dur à éliminer de ma vie. Le simple fait d’entendre les mots « Dieu, Lui, Notre Père », ou tout ce qui se rapportait à ce que je considérais comme de la religion m’éloignait encore plus de mon rétablissement.
J’ai même étouffé le premier mot de la Prière de la Sérénité et du Notre Père, me sentant comme une enfant à l’école obligée de prier alors que je savais que c’était mal. Lorsque nous lisions les Douze Étapes, je sentais tout mon corps se tendre si je devais en lire une avec « Dieu » ou « Lui » dedans. Cela m’irritait presque au point de vouloir quitter le programme. J’avais entendu le dicton « Prends ce dont tu as besoin et laisse le reste », et je m’en moquais. Je n’allais pas faire partie d’une entreprise à laquelle je ne croyais pas à 100 % ou qui ne correspondait pas exactement à mes sentiments. Je détestais aussi l’expression « agir comme si », comme si faire semblant était une méthode acceptable de modification de la pensée.
Pendant des années, j’ai débattu de cette théorie avec toutes les personnes qui voulaient bien m’écouter avant que je ne commence à guérir. C’est tellement faux et bidon de faire quelque chose en quoi je ne crois pas du tout. Après tout, (je plaisante) si je le voulais vraiment, je pouvais changer ce comportement qui jadis ne me préoccupait pas vraiment. Mais je voulais arrêter de ressentir ce que je ressentais quand j’avais des crises de codépendance. Alors je me suis dit que je ne pouvais pas faire partie de ce programme, que c’était une bande d’acteurs et d’actrices qui voulaient en fait boire, se défoncer, faire des bêtises, se mettre en colère, peu importe.

Bien sûr, maintenant je sais que tout cela n’était qu’une autre façon de ne pas être en bonne santé, de rester enlisée dans mes comportements malsains. J’ai finalement pu l’entendre, quand ils ont lu : « Chez CoDA, nous apprenons chacun.e à construire un pont vers une Puissance Supérieure telle que nous la définissons, et nous accordons aux autres le même privilège. » Je n’ai pas changé toutes mes opinions sur l’Église, les chrétiens ou Dieu, peut-être Dieu quand même, mais être capable de développer ma propre idée de ma Puissance Supérieure a été et reste un énorme accomplissement.
Pendant longtemps, ma Puissance Supérieure a été les Réunions, puis ce furent mes ami.e.s CoDA et leurs histoires, puis ce fut mon chien Stanley, quand il est décédé. Maintenant, je ne sais pas ce que c’est vraiment, cela n’a pas d’importance. Je sais qu’il y a quelque chose ou quelqu’un qui m’aide à combattre ma codépendance et qui me donne de petites récompenses à chaque fois que je fais la nouvelle bonne chose qui vient.
L’un des vices auxquels je me suis accrochée après avoir arrêté de fumer ( de l’herbe), a été la cigarette. Je m’étais dit que si j’avais arrêté de boire et de fumer de la marijuana, fumer des cigarettes était tout à fait normal. Mais le 17 octobre, je pense que grâce aux Réunions et à la sagesse du programme, j’ai trouvé la force d’arrêter de fumer aussi. Je pense qu’à ce moment-là, je me suis dit que si je voulais faire les choses correctement, je devais laisser tomber les béquilles. Et même si j’avais déjà essayé d’arrêter une centaine de fois auparavant, en utilisant le patch, la Nicorette, les menaces de mes partenaires, des raisons financières ou simplement la volonté, cette fois-ci, ça a été différent. Cette fois, ça a marché. Cette fois, je voulais briser l’écran de fumée que les fumeurs dressent pour tenir les autres à distance, comme disait John Bradshaw. CoDA m’a aidée à y parvenir.
Avant de m’en rendre compte, j’étais chez CoDA depuis un mois, j’avais assisté à 20 réunions, 5 par semaine, pour respecter la règle des 90 réunions en 90 jours, même si, comme vous le savez, à Austin ( chez moi) , il n’y a pas 90 réunions CoDA en 90 jours, alors j’ai assisté à toutes celles qui étaient disponibles.

Je ne saurais mettre un nom sur ce qui s’est passé pendant ces premiers mois, beaucoup ont qualifié de miracle le processus des 12 Etapes . Pour tout vous dire, je me fiche de la façon dont cela a marché et continue de marcher, je suis juste contente que ce soit le cas. Ma partenaire aussi. Nous sommes de nouveau ensemble depuis le 24 octobre, seulement 30 jours après le début de ma convalescence. Elle vous dirait probablement la même chose, que CoDA a tout changé. CoDA change tout.
Je communique mieux, j’écoute vraiment maintenant (même si j’y travaille encore), je demande au lieu de dire, je peux être seule (et en profiter réellement), je veux au lieu d’avoir besoin, on peut me tenir au lieu de me repousser, je bois du thé au lieu de la vodka, je tiens un journal personnel, et je lis au lieu de fumer des cigarettes ou de l’herbe, je parle au lieu de tout garder pour moi, je suis un peu plus patiente, flexible et compréhensive, au lieu d’être si exigeante, rigide et intransigeante – j’y travaille encore aussi.
Non, je ne suis pas parfaite – Bon sang, combien de temps m’aura-t-il fallu pour l’admettre – – et admettre que je ne le serai jamais. Oui, je trébuche encore et j’agis de manière inappropriée par moments. Mais maintenant, je peux admettre mon erreur, faire amende honorable, travailler pour changer ce comportement et aller de l’avant sans rester coincée dans un état d’esprit de dégoût de moi-même. Je ne suis pas cette souris qui court sans fin dans sa roue sans arriver à rien. Et maintenant, les moments où je ne suis pas parfaite sont de plus en plus rares. C’est un progrès.

J’ai encore des problèmes majeurs à résoudre : les raisons pour lesquelles je suis devenue codépendante, les raisons pour lesquelles j’avais besoin de me cacher par rapport à qui je suis vraiment, et que je ressens encore parfois. J’ai encore de la honte, des regrets, de la culpabilité, de l’anxiété, de la haine de moi-même et de la dépression. J’ai beaucoup de travail à faire pour libérer mon enfant intérieure, pour me pardonner de m’être abandonnée, pour admettre les choses négatives qui m’ont été faites quand j’étais enfant, et pour admettre les choses négatives que j’ai faites aux autres en conséquence.
Je veux toujours apprendre à lâcher prise des choses sur lesquelles je n’ai aucun contrôle, et aussi celles que je n’ai pas le droit de contrôler. Je veux continuer à apprendre à tenter de nouvelles choses, même si je pense que je ne le ferai pas parfaitement, ou que je pourrais totalement échouer. Je veux apprendre quand et comment donner des conseils : quand on me le demande et uniquement sur les sujets sur lesquels on me le demande. Je veux apprendre à écouter et à me taire, même si je pense connaître la réponse.

Je veux apprendre à suivre le courant, à laisser les plans changer et ne pas agir de manière inappropriée. Je veux apprendre à voir le changement comme une porte ouverte par ma Puissance Supérieure, une porte que je n’aurais peut-être pas vue auparavant. Je veux continuer à apprendre à ne pas en faire des montagnes pour des crottes de souris, comme le disait récemment un.e autre membre CoDA. Rien n’est la fin du monde, sauf la fin du monde elle-même, et je parie que ma Puissance Supérieure aura une porte pour moi quand la fin du monde arrivera.
La chose la plus importante que je veux garder à l’esprit, c’est que rien de ce que font les autres ne me concerne ou ne me nuit. Les autres font exactement ce que je fais, ils prennent soin d’eux-mêmes et essaient de faire ce qui est bon pour eux. Le fait de savoir cela et de mettre cette théorie en pratique m’a aidé à garder le devant de ma porte propre, alors que jadis j’aurais peut-être voulu traîner ma pelle à poussière – ou ma benne à ordures – devant la porte du voisin. J’apprends que je n’ai pas besoin d’avoir 400 connaissances, il me suffit d’avoir un ou deux très bons amis.
À chaque problème que je résous, un autre peut surgir. En ce moment, je travaille sur mon perfectionnisme, mon addiction au travail et mon alimentation excessive.
Merci, Puissance Supérieure, de me rappeler que le travail de rétablissement n’est jamais fini.

Je réalise que je ne guérirai pas de cette maladie. Ce n’est pas comme je le pensais quand je suis arrivée dans le Programme et que j’ai demandé quel livre, document, activité ou formulaire prouverait que j’avais fait le travail et que j’étais maintenant libre. Je sais maintenant que cela ne marche pas comme ça. Mais je sais que je vais continuer à me battre et que je ne laisserai pas cette maladie me tuer. Et comme il est dit dans le message de Bienvenue de CoDA, j’ai appris à survivre à la vie, maintenant j’apprends à vivre la vie.
Rien n’a eu un impact aussi phénoménal sur ma vie que CoDA. Je suis une personne plus heureuse, plus libre, plus détendue et plus agréable. La vie n’a pas changé. La vie peut toujours être « naze ». Les gens n’ont pas changé. Les gens ont toujours leurs problèmes. Ma réaction à la vie et à ces gens a changé et continue de changer. J’ai changé et je commence à aimer la personne que je suis en train de devenir.
Merci de m’avoir permis de profiter de cette opportunité pour être honnête, partager mon histoire et poursuivre mon rétablissement.
Michelle R., Austin, Texas
01/10/2002
Traduit du texte original sur CoDA.org par CoDA France- Tous droits réservés- Crédit Photos Pexels
Liste non exhaustive d’autres fraternités 12-12 ( relations codépendantes aux objets, produits, activités)

En savoir plus sur CoDA France
Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.